13.12.22
16:59

Deux ans après la disparition de Delphine Jubillar, l'heure est à la reconstitution

Une reconstitution de la nuit où Delphine Jubillar, une infirmière de 33 ans, a disparu de chez elle en décembre 2020 est prévue mardi à Cagnac-les-Mines, près d'Albi (Tarn), en présence de son mari, Cédric Jubillar, principal suspect.

La reconstitution doit commencer à partir de 20H00 mais dès 10H00 mardi matin, le stationnement dans le quartier pavillonaire du village de 2.500 habitants abritant la maison du couple, était interdit, a constaté une journaliste de l'AFP.

Selon une riveraine, les gendarmes ont donné aux habitants pour consigne de ne pas parler à la presse et de rester confinés chez eux de 20H00 jusqu'au milieu de la nuit.

"Vivement ce soir que ça se finisse parce qu'on en a marre, tout le monde en a bavé depuis deux ans", a confié une passante à l'AFP, sous couvert d'anonymat. Cette voisine, qui a connu le couple pendant des années pense que la reconstitution "ne donnera rien". "De toute façon, il ne parlera pas, je le connais, il ne parlera pas", a-t-elle assuré.

Pendant cette reconstitution qui va se dérouler deux ans quasiment jour pour jour après les faits, les enquêteurs entendent retracer la soirée du 15 au 16 décembre 2020 au cours de laquelle Delphine Jubillar, mère de deux enfants, a disparu du domicile du couple, en laissant derrière elle ses papiers, ses clés et même ses lunettes, et ce en plein couvre-feu dû au Covid-19.

Toutes les parties ont été conviées à la reconstitution dans cette maison inhabitée depuis le drame, et qui n'a jamais été achevée, laissant voir ses murs de briques nues.

Ce type d'opération, organisé "systématiquement dans les affaires criminelles", vise à "reconstituer le scénario", a précisé à l'AFP Samuel Vuelta-Simon, procureur de Toulouse.

Elle se fera "sur la base des déclarations du mis en examen ou des constatations de la police scientifique et des témoignages", a-t-il ajouté.

La reconstitution a été demandée par les avocats de M. Jubillar, qui ne cesse de clamer son innocence.

"J'attends qu'on nous donne le scénario de l'accusation, qui semble pour le moment un petit peu en peine de nous expliquer ce qui s'est passé cette nuit-là", a déclaré Me Jean-Baptiste Alary, l'un de ses avocats, ajoutant: "Il faut qu'on puisse se défendre de faits précis".

 

Ni corps, ni aveux 

Cédric Jubillar, peintre-plaquiste aujourd'hui âgé de 35 ans, a été mis en examen en juin 2021 pour "homicide volontaire par conjoint" et écroué en isolement à la prison de Seysses, près de Toulouse.

Son épouse Delphine lui avait annoncé sa volonté de divorcer et le "contexte de séparation (était) très conflictuel", selon Dominique Alzéari, procureur de Toulouse à l'époque.

D'après ce magistrat, Cédric Jubillar savait que sa femme avait un "amant" et il pouvait parfois se montrer "brutal et agressif".

De surcroît, deux voisines ont déclaré avoir entendu "des cris stridents de détresse" vers 23H00 le 15 décembre et le fils du couple, six ans à l'époque, a dit avoir entendu ses parents se disputer ce même soir.

Cédric Jubillar réfute ces affirmations. Selon lui, sa femme serait sortie de la maison vers 23H00 pour promener leurs deux chiens, vêtue d'une doudoune blanche et avec son téléphone portable.

Réveillé vers 04H00 par les pleurs de leur fille, il a alerté les gendarmes après avoir constaté l'absence de son épouse.

Deux ans plus tard, et à l'approche de la fin de l'instruction, Delphine Jubillar et son téléphone restent introuvables, malgré d'importantes recherches.

Faute de corps, d'aveux ou de preuve irréfutable, une source proche de l'enquête préfère parler d'une "mise en situation" plutôt que d'une "reconstitution".

 

Emoi important 

Mardi soir, Cédric Jubillar devra "reproduire les gestes qui ont été les siens tels qu'il les a décrits depuis le premier jour", avance Me Alary, assurant que son client "n'a rien à cacher".

Si d'autres gestes doivent être reproduits, ils seront mimés par "un plastron", c'est-à-dire un mannequin ou une tierce personne, explique-t-il.

Les parties civiles représentées par leurs avocats espèrent "qu'il se passe quelque chose et que l'affaire se débloque", selon Me Mourad Battikh, avocat de proches de Delphine Jubillar.

"Elles attendent que la vérité émerge" et "que Cédric explique ce qu'il s'est passé et qu'on sache où est le corps" afin d'entamer un processus de deuil, a-t-il ajouté.

Une centaine de gendarmes seront déployés pour sécuriser les lieux et tenir à distance journalistes ainsi que curieux.

La disparition de Delphine Jubillar avait suscité un important émoi en France à l'approche de Noël et peu après la condamnation de Jonathann Daval pour le meurtre de son épouse en Haute-Saône, qu'il avait longtemps nié en jouant le rôle du mari éploré.

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