26.09.22
18:46

Face à face: la Belgique est-elle en train de devenir un narco-État ?

La Belgique est-elle en train de devenir un  narco-État ?  

Cette question fait suite à une série de déclarations récentes d'élus ou de hauts responsables belges.

"C'est un problème national, ce qui se passe à Anvers nous concerne tous. Le danger plane sur nous que la Belgique soit qualifiée de narco-Etat", avertissait le 15 septembre le procureur général de Bruxelles, Johan Delmulle, évoquant aussi un risque de "gangrène".

"Avec Sky ECC, nous avons pu mettre des chiffres sur l'ampleur du défi. La criminalité organisée s'étend à toutes les régions du pays", relevait à ses côtés le Premier ministre Alexander De Croo. 

Il faisait allusion au "craquage" d'une messagerie cryptée très utilisée par les narco-trafiquants, opération qui a permis depuis 18 mois un millier d'arrestations.

MM. De Croo et Delmulle s'exprimaient devant les bourgmestres des grandes villes de Belgique, exceptionnellement réunis avec les ministres concernés dont M. Van Quickenborne afin d'élaborer un "plan XXL" de lutte contre la criminalité liée à la drogue.

Le contexte: un été marqué par une recrudescence de la violence à Anvers, principale porte d'entrée de la cocaïne en Europe, où les gangs rivaux mènent des luttes de territoires, ou s'intimident les uns les autres, à coups de lancers de grenades explosives sur des façades de commerces et d'habitations.

En 2021, une quantité record de 89,5 tonnes de cocaïne a été saisie dans le port, pour une valeur marchande d'environ 13 milliards d'euros.

Les autorités craignent que ces sommes astronomiques encouragent une économie parallèle, avec de la corruption d'agents (douaniers, policiers, dockers etc) et des entreprises utilisées comme "sociétés écrans" pour blanchir l'argent sale.

Selon Michaël Dantinne, professeur de criminologie à l'université de Liège, projeter d'enlever un ministre démontre que certains trafiquants sont prêts à aller plus loin encore dans la violence pour afficher leur "détermination".

"Ils s'adressent à des cibles potentielles de corruption avec ce message: +regardez ce qu'on est capables de faire, vous devez travailler avec nous, pas avec nos concurrents", analyse cet expert.

Letizia Paoli, de l'université de Louvain (KU Leuven), émet l'hypothèse d'une "vengeance" à l'égard d'un ministre qui a musclé la coopération judiciaire avec l'émirat de Dubaï pour obtenir l'extradition de barons de la drogue belges qui y ont trouvé refuge.

"Certains risquent d'être transférés et ne supportent pas l'idée de passer le reste de leur vie en prison. Ils n'ont plus rien à perdre et veulent monter des attaques très spectaculaires", estime cette criminologue italienne.

Nos invités: 

  • Vanessa Matz, députée fédérale Les Engagés 
  • Michel Claise, juge d'instruction 

 

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