07.06.22
20:53

Tirs mortels de policiers à Paris: ce que l'on sait sur l'affaire

Un contrôle de police qui vire au drame : une femme de 21 ans, passagère d'une voiture à Paris, est morte dimanche après avoir été touchée à la tête samedi par des tirs de policiers, qui assurent avoir ouvert le feu sur le véhicule en état de légitime défense.

Les trois policiers sont ressortis libres mardi de garde à vue, sans poursuites judiciaires à ce stade. Une information judiciaire a cependant été ouverte et confiée à un juge d'instruction, pour retracer précisément le déroulement des faits.

Voici ce que l'on en sait pour le moment.

 

La voiture refuse un premier contrôle

Samedi vers 11h00, dans le 18e arrondissement rue Ordener, trois policiers de la brigade territoriale de contact à VTT du commissariat local décident de contrôler une Peugeot 207, avec quatre personnes à bord et lui demandent de s'arrêter.

Selon une source policière, l'un des occupants n'avaient pas mis sa ceinture.

Selon des récits concordants, le conducteur ne s'arrête pas et continue sa route. 

Au niveau du 47 boulevard Barbès, "ce dernier était bloqué dans la circulation puis redémarrait en dépit d'un nouvel ordre qui lui était donné d'arrêter le véhicule", selon la procureure de la République de Paris Laure Beccuau.

"A ce même endroit, deux policiers à vélo et un autre fonctionnaire d'un équipage de police secours, arrivé sur place en renfort, entouraient le véhicule puis ouvraient le feu à plusieurs reprises en sa direction", poursuit la magistrate dans un communiqué. 

 

Récits contradictoires

Comment les faits se sont-ils précisément enchaînés ? Selon une source policière, le conducteur a redémarré et "foncé" sur les policiers qui ont ensuite fait feu.

Selon le témoignage d'un passager du véhicule à RTL, l'un des policiers les a "braqués direct". "Le conducteur a fait comme s'il ne le regardait pas (...). J'ai crié +baissez-vous+, on a entendu les coups de feu, les vitres qui pètent. Après, mon ami a remis la première et redémarré après les coups de feu", a affirmé cet homme de 36 ans.

D'après le parquet, le véhicule a ensuite poursuivi sa course "jusqu'au croisement entre la rue Custine et la rue de Clignancourt où il percutait un autre véhicule."

 

Décès par balle et blessé grave

Le conducteur de 38 ans a été blessé par balle au thorax et la passagère avant, âgée de 21 ans, touchée à la tête par les tirs des policiers. Lors de leur transfert à l'hôpital, ils étaient entre la vie et la mort. 

Les policiers auraient tiré neuf cartouches, selon une source proche du dossier.

Les deux passagers arrière, en état de choc, n'ont pas été blessés. Ils ont été entendus par les enquêteurs.

La passagère avant du véhicule est décédée des suites de ses blessures dimanche. Le conducteur est depuis sorti d'affaires. 

 

Deux enquêtes

Le conducteur, sans permis, a été placé en garde à vue mardi dans le cadre d'une enquête ouverte notamment pour "tentative d'homicide sur personne dépositaire de l'autorité publique" et "refus d’obtempérer aggravé par la mise en danger d’autrui". Elle est confiée à la police judiciaire. 

Les trois policiers qui ont tiré, deux hommes de 23 et 32 ans et une femme de 31 ans, sont sortis mardi de garde à vue sans poursuites judiciaires à ce stade, après 48 heures d'audition à l'Inspection générale de la police nationale (IGPN). 

Pour l'avocat des policiers, Me Franck-Laurent Liénard, "ils n’ont rien à cacher et démontreront leur respect des règles et la légitimité de leur action".

Les investigations se poursuivent dans le cadre d'une information judiciaire ouverte mardi entre autres pour "violences volontaires par personne dépositaire de l’autorité publique ayant entraîné la mort sans intention de la donner". 

 

Appel à témoins

L'IGPN devait lancer mardi un appel à témoins.

L'information judiciaire devra notamment déterminer si les policiers ont utilisé leur arme conformément au code de la sécurité intérieure. 

Selon ce texte, les policiers sont autorisés à tirer en cas de refus d'obtempérer s'ils ne peuvent stopper la voiture autrement que par l'usage des armes et si, dans sa fuite, le conducteur est "susceptibles de perpétrer (...) des atteintes à leur vie ou à leur intégrité physique ou à celles d'autrui". 

Les principes d'"absolue nécessité" et de "stricte proportionnalité", liés à la légitime défense, restent en vigueur.

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