Une réforme pour le droit pénal sexuel
Le ministre de la Justice dépose ce mardi au parlement son projet de réforme du droit sexuel : la majorité sexuelle y est redéfinie ainsi que notamment les notions de consentement et d’inceste. Le volet sur la prostitution fait débat…
C’est un projet de loi important qui est déposé ce mardi au Parlement par le ministre de la Justice. Vincent Van Quickenborne dépose en effet son projet de réforme du code pénal du droit sexuel en commission Justice du parlement fédéral, c’est un projet important qui – s’il est adopté – va changer pas mal de choses notamment sur la majorité sexuelle, la prostitution ou encore le consentement dans le cadre des relations sexuelles. En fait le nouveau code va harmoniser toutes les infractions à caractère sexuel.
Le projet de réforme fixe l’âge de la majorité sexuelle à 16 ans, et toute relation entre un jeune de moins de 16 ans et quelqu’un qui est de plus de deux ans son aîné est considérée comme un viol même s’il y a consentement. Actuellement, pour des jeunes de 14 à 16 ans ayant des relations sexuelles avec un partenaire plus âgé, on estime que l’infraction est l’attentat à la pudeur.
Le ministre va présenter son projet aux députés, ceux-ci désigneront une série d’experts qui pourront faire des propositions d’amendements. Mais une des autres innovations majeures du projet est la définition du consentement. L’usage de contrainte, de violence ou de ruse ne sera plus nécessaire pour qualifier les faits de viol, mais bien l’absence de consentement.
Voici ce que dit le nouveau code en matière de consentement : "Souvent, aucune résistance physique n’est opposée non pas parce qu’il est consenti à l’acte à caractère sexuel, mais par peur". Une attention particulière est portée aux personnes en situation de vulnérabilité due à un état d’inconscience, de sommeil, de peur, à l’influence de l’alcool, de stupéfiants, de substances psychotropes, à une maladie ou à une infirmité ou une déficience physique ou mentale, altérant le libre arbitre.
Autre point : le consentement peut être retiré a tout moment durant l’acte sexuel. Et retirer son préservatif en cours d’acte sexuel est désormais assimilable a un viol. En cas de viol, justement, les peines prévues sont alourdies. Elle sont plus lourdes dans le nouveau projet qu’actuellement : violer une personne en état de vulnérabilité (grossesse, mineur de moins de 16 ans, infirmité mentale…) pourra être passible d’une peine de 20 à 30 ans, tout comme un viol commis lorsqu’il y a inceste. Un viol sera, lui, sanctionné par une peine de 10 à 15 ans de prison.
Et l’inceste est aussi requalifié. L’option qui a été prise est de dire qu’en dessous de 18 ans, on ne peut jamais avoir consenti, au-delà de 18 ans en revanche, les faits ne pourront pas être qualifiés d’inceste – ce que regrette, par exemple, les partis d’opposition. Le voyeurisme est également redéfini, on va , par exemple, pouvoir condamner quelqu’un qui filmerait sous les jupes des femmes. L’opposition est également très critique sur le volet "prostitution" du projet de loi…
On ne va par exemple plus pénaliser le propriétaire qui loue des salons (sauf si ses tarifs sont prohibitifs) et l’idée générale est de "faciliter" la vie des prostituées qui travaillent et se prostituent sans contrainte. On donne ainsi une reconnaissance et une protection aux travailleurs du sexe. Concrètement, la prostitution est donc décriminalisée pour les personnes majeures et non plus simplement tolérée comme c’est le cas aujourd’hui.
Sauf que, rappelle la députée Vanessa Matz dans La Libre, la prostitution libre et consentie, ça ne représente que 10 a 20% des prostituée. Et le nouveau code risque d’être une brèche pour les trafiquants et les réseaux. La définition du proxénétisme est trop restrictive, par exemple dans le cadre de la prostitution de luxe, par exemple aussi dans l’autorisation des eros center, ces centres ou se rassembleront les prostituées mais qui, selon Vanessa Matz, sont désormais aussi la proie des proxénètes et des réseaux.
Il y a donc du pour et du contre dans cette réforme. C’est quand même globalement positif, le code pénal n’a souvent pas été modernisé depuis 1867 et, ici, il y a un véritable effort de prise en compte des plus faibles, on va voir ce que les députés vont en faire.
Martin Buxant