Pensions: L’accord de gouvernement “est un catalogue de bonnes intentions”
Flou, imprécis, irréalisable? Le point sur les pensions de l’accord de gouvernement de la Vivaldi a cristallisé, ces derniers jours, les débats autour de la question d’une pension minimum de 1500 euros.
Pour Pierre Devolder, professeur à l’UCLouvain et membre du Conseil académique des pensions “ces 1500 euros, c'est un trophée”, déclare t-il dans le Pour Info de ce lundi. Pour lui, le point sur les pensions “est un catalogue de bonnes intentions, on ne voit pas très bien la logique. Et une fois de plus, malheureusement, en Belgique, on est dans le syndrome des mesures ponctuelles à gauche et à droite, un patchwork, une espèce de mosaïque.”
Car ce qu’il manquerait actuellement c’est de la cohérence et de la lisibilité. “C’est incompréhensible, c’est inégalitaire, c’est l’héritage de réformes successives” ajoute Pierre Devolder.
Pour Marie-Noëlle Vanderhoven, premier conseiller au Service fédéral des Pensions à la FEB, “avoir un gouvernement moins homogène est une opportunité pour avoir quelque chose de cohérent”. Quant au fait que l’accord ne précise rien sur la question de la pénibilité au travail, elle poursuit : “C’est bien de ne pas aborder les sujets qui cristallisent le débat. Recommençons d’abord par redéfinir quelles sont nos ambitions.”
Un point de vue que ne partage pas Philippe Wuyts, Directeur de Fediplus, car pour lui “si la question de la pénibilité n’est pas dans l’accord, alors on ne l’abordera pas. L’enjeu c’est justement de définir les critères de pénibilité pour harmoniser.”
Réformer pour harmoniser?
Pour Pierre Devolder, il faut une plus grande cohérence car ces nouvelles mesures vont “compliquer les choses.” Il poursuit : “on fait rentrer de force des éléments nouveau dans un système qui date de 1945. On n’est plus dans ce monde. Il faudrait mener une réforme et la pluralité des points de vue au gouvernement permettrait de construire un plan d’ensemble où les gens se retrouveront.”
Pour Roland Gilet, professeur d'économie à l'ULB et à la Sorbonne il faudrait une réforme en profondeur: “Aujourd’hui on a des choses à gérer tout de suite, comme la crise du coronavirus, tout en sachant qu’en repoussant (les réformes, NDLR), ça se complique. On n’a pas de marge de manoeuvre alors qu’il faudrait tout reformater. Mais si on touche à ça, les gens vont se révolter.”
Qui pour financer?
Philippe Wuyts souligne que “les revenus des cotisations augmentent moins vite que les dépenses. Il faut alors une tarte plus grande, en faisant travailler plus de gens et plus longtemps.” Un avis que partage Marie-Noëlle Vanderhoven. D’après elle, “il faut revaloriser le travail et mettre l’accent sur comment travailler le plus longtemps.”
Roland Gilet, professeur d'économie à l'ULB et à la Sorbonne précise “qu’il n’y a pas assez de gens dans les jeunes pour payer les pensions, mais qu’il est tout a fait possible de faire un autre calcul.” Pour Roland Gilet, il faut plus de transparence dans les calculs et être imaginatif, “il faut tout mettre sur la table, pourquoi ne pas aménager de nouvelles obligations dans les piliers?” Car pour l’économiste, il est urgent d’agir maintenant: “Plus on repousse les échéances, plus le trou va se creuser et ce sont les nouvelles générations qui vont devoir payer sans savoir si elles en auront les moyens”.
Pierre Devoldere abonde avec son confrère : “Il faudrait regarder toutes les générations. Une politique des pensions, c’est un contrat entre les générations. Car ce sont les jeunes qui vont payer.” Quant à la question de trouver de l’argent dans la fraude fiscale, le professeur de l’UCLouvain n’y voit alors qu’une simple “chimère”.